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LE ROLE DE LA CAUTION DANS L’ECONOMIE FRANCAISE

 

 

 

 

 

 

 

Le Club des Emetteurs de Caution, récemment créé au Centre des professions financières a organisé le 16 Septembre 2019 un séminaire sur le rôle de la caution dans l’économie française.

Est retranscrite l’intervention faite par Xavier PEQUIN lors de cette manifestation.

INTRODUCTION

  • Définition et nature de la garantie.

Le cautionnement se définit comme l’engagement d’une personne (physique ou morale) envers un créancier d’exécuter une obligation dont le débiteur principal est lui-même défaillant.

Le plus souvent, il s’agit d’une obligation de payer, mais elle peut être une obligation de faire.

On en trouve des illustrations dans les cautions légales avec l’obligation de rapatriement des touristes partis par une agence de voyages

ou celle d’achèvement d’une maison individuelle.

Cette garantie est une sûreté personnelle, au contraire de la sûreté réelle où le paiement est garanti par certains biens du débiteur qui sont hypothéqués ou nantis.

Il s’agit d’un « engagement par signature » d’une autre personne aux côtés du débiteur, auquel ce dernier n’est pas partie ;

c’est pourquoi il est accessoire au contrat principal.

  • Déroulement de l’intervention.

L’ampleur et la technicité du sujet conduira à ne retenir ici que certains aspects essentiels du cautionnement qui donnent lieu à de vifs débats devant les Tribunaux et Cours, et sur lesquels le législateur est, ce de fait, d’une particulière vigilance.

Après avoir évoqué le développement du cautionnement, depuis ses lointaines origines jusqu’à la réforme amorcée ; seront abordées, dans le cadre de sa souscription, les limites imposées à cet engagement notamment au regard du principal et des intérêts de la dette ; avant de s’attarder sur les incontournables principe de proportionnalité et mentions manuscrites.

Enfin, sera envisagée la poursuite de la caution, en soulignant les impératifs auxquels le créancier doit alors se soumettre.

PREMIERE PARTIE

 DES ORIGINES JUSQU’A LA PROCHAINE REFORME

 1 – ORIGINES ET DEVELOPPEMENT

 Le cautionnement remonte à la plus haute antiquité ; on attribue son invention aux Grecs.

L’on se souvent de la fameuse inscription sur le temple de Delphes :

« Donne toi pour caution et tu n’es pas loin de la ruine. »

Son développement a connu des fortunes diverses, mais depuis la Seconde Guerre Mondiale, il est régulièrement utilisé dans les relations commerciales.

Il ne manquera pas de susciter une vive concurrence entre les banques et les compagnies d’assurance, sur laquelle le Conseiller d’Etat RENAUDIN eût à se prononcer dans le cadre d’un arbitrage en date du 06.10.1952.

Il conclut à l’époque que le cautionnement relève du seul domaine bancaire.

Il faut attendre plus de vingt ans pour qu’une directive communautaire du 24.07.1973 sur la liberté d’établissement remette en cause cette attribution de compétence exclusive.

Désormais, la caution « directe ou indirecte » constitue la branche 15 des opérations d’assurance.

La délivrance des cautions de marché et des garanties financières légales est de cette façon réservée aux Banques et Etablissements Financiers

ainsi qu’aux Compagnies et Mutuelles d’assurance.

Les tables rondes permettront d’apprécier à la fois l’ampleur, la diversité et le dynamisme du secteur.

2 – LA GARANTIE ESSENTIELLE DES ENGAGEMENTS FINANCIERS DES ENTREPRISES.

Il y a trois raisons à ce que le cautionnement soit l’une des principales garanties -voire la garantie- des engagements financiers des entreprises :

  • La difficulté des entreprises à fournir des sûretés réelles.

Peu d’entre elles, surtout si elles sont récentes, possèdent des actifs dont elles peuvent disposer.

Immeubles et matériels d’exploitation sont le plus souvent loués sous diverses formules.

  • Le cautionnement responsabilise les dirigeants et associés de l’entreprise.

On connaît le discours classique du banquier à l’entrepreneur :

S’il croit à son affaire, il ne doit pas hésiter à en être caution.

Cette démarche tient à vouloir en réalité retenir la responsabilité des personnes qui gèrent et possèdent l’entreprise.

En la cautionnant, elles ne peuvent plus s’abriter derrière l’entreprise pour ne pas payer à sa place, si elle devient insolvable.

  • Le cautionnement est une sûreté éprouvée.

Remontant à l’antiquité comme nous l’avons vu,

Elle est régie fondamentalement par le Code civil.

Si elle donne lieu à une jurisprudence abondante de même qu’à une intervention croissante du législateur, elle n’en évolue pas moins dans un environnement juridique connu et déterminé.

La Loi et la jurisprudence s’efforcent d’assurer la protection des cautions personnes physiques tout en améliorant l’efficacité de la garantie.

3  – LA REFORME DU DROIT DES SURETES.

Dans cet esprit, la Loi PACTE du 22.05.19 autorise par son article 60 le Gouvernement à :

« Prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de deux ans à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour simplifier le droit des sûretés et renforcer son efficacité, tout en assurant un équilibre entre les intérêts des créanciers, titulaires ou non de sûretés, et ceux des débiteurs et des garants et à cette fin :

 1 – Réformer le droit du cautionnement, afin de rendre son régime plus lisible et d’en améliorer l’efficacité, tout en assurant la protection de la personne physique. »

Au préalable, la Chancellerie avait chargé une Commission constituée par l’Association Henri CAPITANT et présidée par le Professeur GRIMALDI,

de rédiger un avant-projet de réforme des sûretés, paru en 2017.

L’on connaît donc dès à présent les dispositions qui se trouveront modifiées dans les deux prochaines années et leur orientation.

DEUXIEME PARTIE

  MODALITES ET PRINCIPES DE SOUSCRIPTION

  1. ETENDUE DU CAUTIONNEMENT ET SOLIDARITE
  • L’obligation principale.

Le cautionnement peut être contracté pour une partie de la dette seulement et sous des conditions moins onéreuses.

A l’inverse, il ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses.

Cependant, il ne sera pas frappé de nullité ; mais seulement réductible à la mesure de l’obligation principale.

  • Le bénéfice de discussion.

En règle générale, le cautionnement porte sur l’intégralité de la dette et avec solidarité entre la caution et le débiteur.

La solidarité a pour effet que la caution est tenue au même titre que le débiteur à l’égard du créancier.

Elle ne peut donc lui opposer ce que l’on appelle le bénéfice de discussion qui contraint le créancier à « discuter dans ses biens » le débiteur, c’est-à-dire à le poursuivre d’abord sur son patrimoine.

La solidarité de la caution avec le débiteur permet ainsi au créancier de poursuivre directement l’une et l’autre ou même la caution seule.

  • Le bénéfice de division.

La solidarité emporte aussi la renonciation au bénéfice de division, si les cautions sont plusieurs.

Cette solidarité des cautions entre elles permet au créancier soit de les poursuivre toutes, soit l’une ou certaines d’entre elles, en réclamant à chacune l’intégralité de la dette.

Il n’aura pas à « diviser » les poursuites.

2.LE PRINCIPAL, LES INTERETS ET ACCESSOIRES DE LA DETTE.

Schématiquement, l’on distingue 3 cas principaux :

  • Le cautionnement limité dans son montant.

La caution s’engage à concurrence d’un montant déterminé.

La jurisprudence considère que si le montant ne comporte pas d’autres précisions, le cautionnement ne peut excéder la somme indiquée.

En conséquence, pour s’étendre aux intérêts et accessoires, le cautionnement doit l’indiquer de manière expresse.

  • Le cautionnement indéfini d’une obligation principale.

C’est en ces termes que le Code civil désigne en réalité le cautionnement d’une dette déterminée (prêt, ouverture de crédit…).

Il n’a pas d’autres limites que celles de l’obligation principale.

Il s’étend à tous les accessoires de la dette prévus au contrat principal c’est-à-dire les intérêts, d’une part, et les éventuelles pénalités et les frais, d’autre part.

  • Le cautionnement illimité.

Il consiste à garantir toutes les dettes du débiteur envers le créancier.

C’est pourquoi on l’appelle cautionnement « omnibus ».

Il ne s’agit plus ici de déterminer le principal et de le dissocier des intérêts et accessoires.

La validité de ce cautionnement suppose que les obligations garanties soient déterminables, mais que le montant de la somme que la caution s’est engagée à payer ne peut être chiffré au moment de l’acte.

Lorsque l’engagement le précise clairement, il couvre les dettes présentes comme futures.

Un cautionnement indéfini est une exigence fréquente des banques pour accorder leur concours aux entreprises.

Le compte courant fait d’habitude l’objet d’un cautionnement indéfini.

En raison du caractère indivisible du compte courant, son cautionnement porte sur le découvert de ce compte ; sans que l’on puisse en dissocier les opérations.

Se trouve de la sorte garanti le solde débiteur du compte bancaire.

Ceci étant, nul ne saurait donc sérieusement nier l’importance et les enjeux du cautionnement.

Le garant dispose certes d’un recours  en remboursement contre la caution et  de la subrogation dans les droits et actions du créancier qu’elle a désintéressé ; ce qui lui permet de recourir contre les autres cautions solidaires, le cas échéant.

Néanmoins, elle supporte alors seule le risque de l’insolvabilité de ces personnes et peut aussi bien se retrouver ruinée, avec la part insaisissable de ses rémunérations pour uniques ressources.

Pour ces raisons, ont été instaurés un plafond d’engagement et une règle de proportionnalité

  • Le plafond de l’engagement de la caution personne physique envers le créancier professionnel.

Il résulte des mentions manuscrites obligatoires de l’acte de cautionnement qui vont être abordées ci-après que le cautionnement doit être expressément limité à une somme qui inclut le principal, les intérêts et éventuelles pénalités de retard et ceci lorsqu’il est consenti par une personne physique au profit d’un créancier professionnel.

Cette qualité de créancier professionnel n’est pas réservée aux seuls établissements de crédit mais est reconnue à tout créancier qui requiert un cautionnement dans le cadre de son activité professionnelle ;

De sorte qu’une SCI louant ses biens, une association… ont été qualifiées de professionnelles.

3 – LA PROPORTIONNALITE DE L’ENGAGEMENT AVEC LE PATRIMOINE ET LES RESSOURCES DE LA CAUTION.

  • Sa source.

Le principe dégagé par notre Droit est que si la caution est libre d’engager l’intégralité de ses patrimoine et revenus -elle ne doit pas pour autant se voir imposer un engagement qui soit manifestement disproportionné à ces derniers.

Cette règle existe à l’origine dans le Code de la consommation (actuellement à l’article L.314-18) pour les crédits à la consommation et les crédits immobiliers.

  • Les revirements de la jurisprudence.

La jurisprudence s’en est inspirée pour apprécier les engagements demandés par les Banques aux dirigeants d’entreprise.

Par un Arrêt du 17.06.1997, la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation a approuvé la Cour d’Appel de Paris qui a condamné un dirigeant, un certain Monsieur MACRON, à payer 20 Millions de Francs à la Banque tout en condamnant celle-ci à lui régler 15 Millions de dommages et intérêts; de sorte que son obligation était réduite à 5 Millions.

Etait sanctionnée la faute du banquier, exclusive de toute bonne foi : la somme garantie excédant cinq fois le patrimoine du dirigeant et les seuls intérêts étant cinq fois supérieurs à ses revenus mensuels.

Le cas était exceptionnel par son ampleur.

La Cour de Cassation a voulu par la suite n’apprécier le déséquilibre économique que pour les cautions « profanes » et non les dirigeants, censés être « avertis » de la nature de la portée de leur engagement.

La Chambre Commerciale de la Cour de Cassation, le 08.10.2002 abandonnait le principe de proportionnalité au détriment d’un autre dirigeant Monsieur NAHOUM qui ne démontrait pas que la Banque aurait eu sur ses revenus, patrimoine et facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l’état du succès escompté de l’opération immobilière menée par la Société, des informations que lui-même aurait ignorées.

La caution était ici déboutée car le montant garanti était en rapport avec les profits envisagés de la promotion immobilière.

  • La codification du principe de proportionnalité.

La Loi du 01.08.2003, dite Loi DUTREIL, a introduit un article dans le Code de la consommation (originellement article L.341-4 devenu L.332-1 et L.343-4) édictant qu’« un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. »

De la sorte, le législateur est allé bien au-delà de la jurisprudence MACRON :

le cautionnement disproportionné n’est pas réduit par compensation entre son montant et celui de dommages et intérêts, mais devient « inopposable » à la caution, le créancier ne pouvant plus s’en prévaloir .

De plus fort, en généralisant un « cautionnement conclu par une personne physique » le législateur contraignait les juges appliquer cette disposition, y compris aux dirigeants d’entreprise, (notamment Cass. Com. 22.06.10) .

  • La jurisprudence actuelle.

Les juges ont par ailleurs renoncé à la faculté retenue par l’Arrêt NAHOUM de déterminer la proportionnalité de l’engagement à l’aune des profits que doit générer l’opération garantie.

La Chambre Commerciale affirme désormais que « la proportionnalité de l’engagement de la caution ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l’opération garantie. » (Cass. Com. 27.01.15.)

La preuve de la disproportion manifeste incombe à la caution ; celle de sa capacité à régler, lorsqu’elle est appelée, incombe en revanche au créancier.

Le tout relève de l’appréciation souveraine des Juges du fond, au cas par cas.

L’interdiction de se prévaloir d’un engagement manifestement disproportionné n’est pas limitée aux seules opérations de crédit régies par le Code de la consommation, mais s’applique, quelle que soit la nature de l’opération garantie, telle un bail commercial (Com. Cass. 22.02.17).

Sachant en outre :

  • Que la disproportion s’apprécie au jour de signature de l’acte de cautionnement ;
  • En prenant en considération l’endettement global de la caution,

y compris celui résultant de cautionnements antérieurs ;

  • En appréciant séparément leur solvabilité lorsqu’elles sont plusieurs cautions solidaires ;
  • Selon les renseignements sur sa situation personnelle fournis par la caution au créancier qui n’a pas à les vérifier, sauf anomalie ou incohérence flagrante ;
  • Que la caution est de la sorte liée par ses indications et évaluations

de ses biens et revenus, comme de ses charges, dettes et autres engagements.

Les juristes et professionnels s’accordent à reconnaître les applications cohérentes de la Loi et conformes à son esprit par des magistrats qui manifestent leur souci de respecter tant les intérêts du créancier que ceux de son garant.

La contestation qui n’a cessé de s’exprimer dès la publication de la Loi DUTREIL, s’est surtout concentrée sur la sanction du cautionnement manifestement disproportionné qui est l’impossibilité de s’en prévaloir.

Ce « tout ou rien »  interdit de condamner la caution à payer selon ses moyens.

C’est pourquoi, l’avant-projet de réforme du cautionnement envisage une nouvelle rédaction de l’article 2301 du Code civil :

« Le cautionnement souscrit par une personne physique est réductible s’il était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux revenus et au patrimoine de la caution, à moins que celle-ci, au moment où elle est appelée, ne soit en mesure de faire face à son obligation. »

Une telle disposition devrait satisfaire les créanciers, en évitant à la caution une condamnation excédant le montant de ce dont elle peut en réalité s’acquitter mais en maintenant la faculté pour le créancier de prouver qu’elle peut s’exécuter intégralement au moment où il l’appelle.

L’on notera qu’elle ne mentionne plus le créancier et ce texte -s’il est voté- s’imposera à tout créancier, professionnel ou non.

4  – LES MENTIONS MANUSCRITES.

D’autres dispositions de la Loi DUTREIL ont été critiquées et d’autant plus vivement qu’elles ont généré une abondante jurisprudence.

Il s’agit de l’article L.331-1 du Code de la consommation :

« Toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel fait précéder sa signature de la mention manuscrite suivante et uniquement de celle-ci.

 En me portant caution de X……………….., dans la limite de la somme de……………….. couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de……………….., je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X……………….. n’y satisfait pas lui-même. »

Et de l’article L.331-2 :

« Lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution fait précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : 

 En renonçant au bénéfice de discussion défini à l’article 2298 du Code civil et en m’obligeant solidairement avec X je m’engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu’il poursuive préalablement X « .

Ces deux articles obligent le créancier à obtenir de la caution une véritable « page d’écriture », copie servile des mentions légales, sous peine de nullité pure et simple de l’engagement.

Inéluctablement, la Cour de Cassation a eu à se prononcer sur des cas extrêmes, allant jusqu’à sanctionner une Cour d’Appel en affirmant que :

« Ni l’omission d’un point, ni la substitution d’une virgule à un point entre la formule caractérisant l’engagement de la caution et celle relative à la solidarité, ni l’apposition d’une minuscule au lieu d’une majuscule au début de la seconde de ces formules, n’affectent la portée des mentions manuscrites conformes pour le surplus aux dispositions légales. (Cass. Civ. 1ère 11.09.13). »

Désormais, la Cour de Cassation n’admet l’erreur ou l’irrégularité matérielle comme cause de nullité de l’engagement que lorsque celle-ci porte atteinte à un élément essentiel permettant à la caution de mesurer la portée exacte de son engagement ; c’est-à-dire qui entraîne une modification du sens et de la portée des mentions légales dont la validité se trouverait alors affectée. (Cass. Civ. 1ère 09.07.15, 22.09.16 et Cass. Com. 14.06.16).

L’avant-projet de réforme emporte l’abandon de la nécessité de reproduire à l’identique les mentions légales, en proposant que l’article 2298 du Code civil se borne à édicter que :

« La caution personne physique appose elle-même, à peine de nullité de son engagement, la mention qu’elle s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres.

 En cas de cautionnement solidaire, la caution reconnaît dans ladite mention être tenue solidairement et ne pouvoir exiger du créancier ni qu’il poursuive d’abord le débiteur, ni, le cas échéant, qu’il divise ses poursuites entre les cautions. »

L’on observera que ces mesures s’appliqueraient elles aussi à tous les créanciers et non plus aux seuls professionnels.

TROISIEME PARTIE

 LA POURSUITE DE LA CAUTION

 1 – EXIGIBILITE DE LA DETTE GARANTIE.

C’est la défaillance du débiteur qui permet au créancier de mettre en jeu le cautionnement ; c’est-à-dire de demander à la caution -en vertu et dans la limite de son engagement- les sommes qui lui sont dues par le cautionné

Ce défaut de paiement est bien sûr un préalable à l’appel en garantie de la caution et suppose qu’il porte sur une créance liquide, certaine et exigible.

Cette exigibilité résulte souvent du défaut de paiement au terme du contrat ou de l’une de ses échéances.

2 – MISE EN DEMEURE DE LA CAUTION.

 Ses modalités

En pratique, le créancier devra avoir mis en demeure le débiteur, en justifier à la caution et mettre à son tour celle-ci en demeure de satisfaire à son engagement.

La renonciation au bénéfice de discussion et de division étant, rappelons-le, quasi systématique ; la caution est contrainte de s’exécuter.

Cependant, elle ne doit pas nécessairement les mêmes sommes que le débiteur principal.

Tout d’abord, la créance totale ne peut excéder le montant en principal et intérêts mentionné dans l’acte de cautionnement.

Ensuite, la caution peut opposer au créancier la déchéance du droit aux intérêts contractuels s’il n’a pas satisfait à son obligation d’information à son égard.

  • La sanction du défaut d’information

Cette information est de deux ordres :

  • Sur l’état de la dette.

L’article L.313-22 du Code monétaire et financier bénéficie à toute caution d’entreprise : personne morale ou physique, y compris le dirigeant lui-même mais à condition que le créancier soit un Etablissement de crédit ou une Société de financement ayant accordé son concours,  quelle qu’en soit la forme, à une entreprise.

Cette dernière s’entend de toute personne ayant une activité économique, même exclusive de la recherche de profit ; tel est le cas entre autres nous l’avons vu, de sociétés civiles et associations.

L’information est faite annuellement, avant le 31 mars :

– D’une part, elle indique le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires qui restaient à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre des concours financiers cautionnés.

– D’autre part, elle rappelle le terme du cautionnement, s’il est à durée déterminée, ou la faculté de le révoquer, s’il est à durée indéterminée.

Le créancier doit rapporter la preuve de l’envoi de l’information et de la conformité de son contenu.

En revanche, la Cour de Cassation le dispense de prouver sa bonne réception (Cass.Com 12.07.13).

La copie d’un courrier simple s’avère suffisante. (Cass. Com. 09.02.16).

Le défaut d’accomplissement de cette information emporte et ce, bien sûr, uniquement dans les relations entre l’établissement de crédit et la caution et non à l’égard du débiteur, déchéance des intérêts échus depuis la date à laquelle l’information devait être fournie jusqu’à la date à laquelle elle le sera effectivement.

Les intérêts perdus sont ceux conventionnels, la caution restant néanmoins tenue aux intérêts au taux légal.

Enfin, dans les rapports entre la caution et l’établissement de crédit, les paiements effectués par l’entreprise débitrice sont réputés être affectés en priorité au règlement du principal de la dette.

Inutile de dire que ces dispositions ont nourri et nourrissent encore une importante jurisprudence et les Juges sont parfois conduits à désigner un Expert pour faire le compte des sommes finalement dues, une fois les intérêts conventionnels extournés.

Le Code de la consommation reprend les mêmes règles et sanctions, et l’étend aux relations entre un créancier professionnel * et une caution personne physique. (article L.341-1 et L.341-6).

  • Sur la défaillance du débiteur principal.

Là aussi, les dispositions se juxtaposent.

L’article 47 de la Loi du 11.02.94 relative à l’initiative et à l’entreprise individuelle enjoint au créancier d’informer la caution d’une dette professionnelle contractée par une entreprise individuelle ou en société de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident non régularisé dans le mois d’exigibilité du paiement.

A défaut, la caution n’est pas tenue du paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.

Le Code de la consommation prévoit la même obligation en matière de crédits à la consommation et de crédits immobiliers, mais avec certaines exclusions (notamment crédits par acte notarié).

3 – UNE HARMONISATION ET UNE SIMPLIFICATION NECESSAIRES DES TEXTES.

Puisque l’information doit être délivrée, autant qu’elle soit complète et cohérente ; c’est-à-dire harmonisée quant à son auteur et son destinataire, son objet et son étendue ainsi que sa sanction.

C’est le moyen qu’elle soit connue, comprise et admise par tous, d’un côté et que les recours contentieux diminuent, de l’autre.

« Un tel foisonnement d’obligations d’informations, dont plusieurs ont approximativement le même objet et partiellement le même champ d’application, constitue l’illustration paroxystique d’une méthode législative détestable, placée sous le signe de l’improvisation la plus incohérente ».(P. SIMLER et P. DELEBECQUE : Précis DALLOZ Droit des sociétés).

L’avant-projet de réforme envisage de manière raisonnable que l’obligation d’informer de l’état de la dette et la défaillance du débiteur pèse sur le créancier professionnel à l’égard de toute caution personne physique ; ce qui figurerait aux nouveaux articles 2303 et 2304 du Code civil dont la généralité de l’application permettrait alors de s’en tenir à ces seuls articles.

CONCLUSION

En définitive, le cautionnement est bien ancré dans notre système économique et constitue un incontournable instrument de crédit.

L’on peut déplorer qu’une sûreté engendre néanmoins un vif contentieux; ce qui est quelque peu paradoxal.

Son évolution juridique, parfois tourmentée et incertaine, ne dissuade pas pour autant les professionnels d’y recourir et même d’y trouver de nouveaux débouchés.

L’un des plus exemplaires ces dernières années est celui du cautionnement qui se substitue à l’hypothèque pour garantir des prêts immobiliers.

Quant aux garanties financières légales, elles procèdent pour la plupart du cautionnement, sans que le législateur n’ait estimé opportun de remettre en cause ce mode de garantie.

Au contraire, il s’impose dans des domaines nouveaux,